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Témoignage : victime de revenge porn, j’ai subi plus de 2 ans de chantage et de viols

Témoignage : victime de revenge porn, j’ai subi plus de 2 ans de chantage et de viols

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Image d’illustration. © Justin Snyder Photo / Unsplash

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Par La Zep

Publié le

L'ex d'Alice a menacé de publier des photos volées pour obtenir ce qu'il voulait. Il l'a violée pendant plus de deux ans.

Mon ex-petit ami m’a fait chanter pendant plus de deux ans avec des photos intimes. Un jour, on était en sortie en base de loisirs, j’étais allée prendre ma douche quand il m’a prise en photo à mon insu. Une fois rentrée chez moi, il m’a envoyé la photo en me disant de lui envoyer des nudes, sinon il m’a dit qu’il allait poster la photo sur tous ses réseaux et à mes cousins et que j’allais avoir une réputation de “pute” dans ma ville.

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Je me suis sentie coincée, alors je lui ai envoyé des photos par peur. Sauf qu’à chaque fois que je lui en envoyais, il les enregistrait et me faisait chanter avec. Pendant deux ans et demi, ça a été comme ça, et durant ces deux ans et demi, il m’a violée. Il voulait qu’on le fasse mais je lui disais non, que je n’avais pas envie parce que je n’étais pas prête et que je voulais rester vierge jusqu’à mon mariage. Mais il me forçait quand même, à me dire : “Bah alors je rentre mon doigt t’inquiète pas, ça va pas te dévierger.”

Je lui ai dit non aussi, mais il s’est énervé et m’a tiré les cheveux, ensuite, il a pris ma main et l’a mise sur sa partie intime. J’étais figée, j’étais là sans être là, et puis il a fait ce qu’il voulait faire.

En parler m’a libérée d’un poids

Je ne me rendais pas compte de ce que je vivais. Je me sentais juste sale, comme une pute. Malgré ça, il a continué son chantage et c’était de pire en pire. Puis, un jour, je suis partie en vacances. Soulagée, je me disais que j’allais être tranquille, mais non. Il a continué à me faire chanter, à m’envoyer des photos de moi en me menaçant.

L’association féministe #StopFisha lutte contre les violences sexistes en ligne, et plus spécifiquement contre le revenge porn. Si vous êtes concernée, il est possible de les contacter via une adresse mail anonyme pour obtenir de l’aide :

Je n’en dormais pas de la nuit, j’avais peur d’en parler donc j’ai tout gardé pour moi. Ça s’est arrêté quand j’avais 16 ans. J’ai réussi à en parler plus d’un an après à la copine de ma tante car je me sentais en confiance avec elle et elle me connaît depuis que je suis petite. Ça m’a libérée d’un poids. Elle m’a aussi accompagnée dans la démarche d’aller en parler à ma tante et ma mère.

Je le déteste, il m’a tuée vivante

Quand il me faisait chanter, personne ne m’a aidée. J’étais seule face à lui et, comme je ne parlais à personne, je gardais tout en moi. Quand j’en ai parlé à ma tante, à sa copine, et à ma mère, elles m’ont conseillée de porter plainte mais je n’ai pas voulu car l’histoire était passée et je ne voulais pas que mon histoire soit entendue en public. Je le déteste parce qu’aujourd’hui il vit sa vie, normalement, sans rien sur sa conscience, alors que moi il m’a tuée vivante et je devrai vivre avec ça toute ma vie.

J’ai voulu reprendre contact avec lui pour qu’il m’explique pourquoi il m’avait fait ça et, avant tout, pour lui faire comprendre qu’il m’avait détruite. Quand je lui ai demandé : “Pourquoi tu m’as violée ? Pourquoi tu m’as fait chanter ?” Il m’a répondu : “Je t’ai pas violée, c’est quoi cette phase que tu me tapes là ?”  J’ai dit : “Ah bon donc j’invente ?”, et je suis sortie de mes gonds en criant tout ce que je ressentais à cause de ça.

J’ai pris l’exemple de sa nièce : “Demain, ta nièce vient te raconter tout ça, tu vas lui dire que c’est pas un viol ? Que c’est pas du chantage ?” Il m’a dit “azy”, ne s’est même pas excusé et a raccroché. Par la suite, je l’ai bloqué partout, sur les réseaux sociaux et mon téléphone.

Il faut que ça soit moi qui vienne vers le garçon

Je ne sais pas ce qu’il devient et ça ne m’intéresse pas. Je sais qu’il est sorti de prison hier. Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai ressenti cette peur. Aujourd’hui, je me sens toujours aussi coupable de l’avoir laissé entrer dans ma vie et tout gâcher. Je ne sais pas pourquoi mais, par moment, je me sens sale…

Maintenant, quand je suis en couple et que le garçon va poser sa main sur ma cuisse ou autre, je vais la retirer, me figer et avoir peur. Je ne saurais pas expliquer pourquoi. Quand je suis en couple, il faut que ça soit moi qui vienne vers le garçon sinon je vais vraiment me sentir pétrifiée. Maintenant, je sais que si je ne me sens pas en confiance, je pars.

Je suis devenue agressive avec les gens à cause de cette histoire. Je le hais parce qu’il m’a volé quelque chose de très précieux à mes yeux, ma pudeur.

Alice, 18 ans, lycéenne, Saint-Denis 

Ce témoignage provient des ateliers d’écriture menés par la ZEP (la zone d’expression prioritaire), un média d’accompagnement à l’expression des jeunes de 15 à 25 ans, qui témoignent de leur quotidien comme de toute l’actualité qui les concerne.