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Témoignage : je me bats contre une maladie taboue, l’endométriose

Témoignage : je me bats contre une maladie taboue, l’endométriose

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© Peter Dazeley / Getty Images

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Par La Zep

Publié le

Cette maladie gynécologique touche une femme sur dix. Pour Souheila, "c'est un combat qui se mène sur tous les fronts".

J’ai décidé de parler de mon calvaire. Cela a commencé à l’âge de 12 ans. Je revois encore ma mère, atteinte également d’endométriose, me donner 10 euros lorsque je l’ai appelée en panique pour lui montrer ma culotte avec mes premières gouttes de sang. C’était mes premières règles, elle m’a donné cet argent et m’a dit : “Bon courage ma fille, c’est le début des problèmes…” Ma mère m’a parlé dès le plus jeune âge des règles et des douleurs qu’elle avait. J’ai vite compris qu’être une femme allait être compliqué.

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Ma première crise de douleur, c’était lors de ces premières règles. Je me souviens être allée au cinéma avec mon frère et que, la douleur étant très vive, j’ai vomi partout dans le cinéma. Je n’arrivais plus à marcher, avec des diarrhées et des crampes insupportables. Pas très sexy… Mon père m’a emmenée chez le médecin, pensant que c’était une gastro-entérite. Ce médecin m’a prescrit tout l’attirail contre la gastro (super médecin !). Je ne savais pas du tout que c’était l’endométriose : je pensais comme tout le monde que c’était une gastro mais, avec le temps, j’ai vite compris que cette “gastro” reviendrait tous les mois.

“Mais mademoiselle, toutes les filles ont mal voyons…”

Par la suite, j’ai eu le bonheur de me faire balader de gynécologue en gynécologue. “Mais mademoiselle, c’est normal d’avoir mal pendant les règles, toutes les filles ont mal voyons…” Et, en guise de réponse médicale, ils me prescrivaient une pilule. Sans plus d’examens. Si j’avais entendu : “Mais Mademoiselle, je m’en fous de vos douleurs, vous faites du cinéma allez… On va vous foutre sous pilule comme ça vous fermerez votre gueule et ça sera réglé !”, ça aurait été la même chose. J’avais l’impression qu’on ne me considérait pas, qu’on me prenait à la légère. J’avais le sentiment d’être une moins que rien. Au début, j’ai fait confiance à leur diagnostic, même si une partie de moi restait sceptique. Je me disais : “Bon… Ils sont médecins, pas toi.”

Ce parcours du combattant pour être bien diagnostiquée, la chanteuse Lorie Pester, atteinte d’endométriose, l’a vécu. Il y a quelques mois, elle a accepté d’en parler à Konbini news afin de rappeler que “ce n’est pas normal d’avoir mal, même si on vous dit que ça l’est”. Voici son témoignage :

J’ai pris plusieurs pilules différentes et ça m’a littéralement bousillée. J’ai pris énormément de poids – plus de 15 kg –, j’ai eu des poussées d’acné autour de la bouche (qui d’ailleurs restent toujours un mystère aujourd’hui), des bouffées de chaleur, des fringales, de la rétention d’eau. J’ai ensuite vu une endocrinologue qui m’a parlé d’endométriose et m’a donné une IRM à faire. Elle m’a également ordonné d’arrêter tous les traitements. Suite à ça, j’ai vécu plusieurs mois à l’étranger et j’ai perdu tous les kilos et mes boutons. Mais les douleurs pendant les règles, en dehors et pendant mes rapports sexuels étaient encore présentes. J’en avais marre, c’était insupportable. J’ai donc décidé de rentrer en France pour faire cette IRM.

Une boule bizarre sur mon ovaire gauche

J’ai donc fait cette IRM. Ce n’était pas DU TOUT une partie de plaisir. À la fin de l’examen, le médecin est venu me voir et m’a dit : “Asseyez-vous, il faut qu’on parle… Avez-vous particulièrement mal à l’ovaire gauche ?” Je lui ai répondu que oui, “très mal, et souvent”. Elle m’a expliqué qu’ils avaient trouvé une boule bizarre sur mon ovaire gauche et qu’ils ne savaient pas ce que c’était. Je lui ai demandé si j’avais bien une endométriose, elle m’a répondu qu’elle ne savait pas et qu’il fallait que je prenne la pilule. Lorsque j’ai entendu (encore !) le mot “pilule”, j’ai arrêté de l’écouter…

Après avoir vu plusieurs médecins, fait des milliards de recherches pour trouver une personne compétente qui saurait m’expliquer ce que j’ai, je suis enfin tombée sur un bon médecin qui m’a enfin diagnostiqué une endométriose, à l’âge de 23 ans. Il m’a tout expliqué sur la maladie et sur mon cas. Son diagnostic, bizarrement, a presque été un soulagement. J’avais l’impression d’être une personne étrange : en sortant de mon rendez-vous, j’avais le sourire parce que je savais ce que j’avais.

Être une femme, c’est une chance merveilleuse je pense, mais au moins une fois par mois, j’ai envie d’être un garçon. Il m’est déjà arrivé de pleurer en sentant mes règles arriver et en sentant les premières douleurs en bas du ventre. L’endométriose est un combat qui se mène sur tous les fronts. Entre les douleurs, le fait de ne pas trouver de bon médecin, il faut avoir le moral bien accroché.

Souheila, 23 ans, salariée, Val-de-Marne

Ce témoignage provient des ateliers d’écriture menés par la ZEP (la Zone d’Expression Prioritaire), un média d’accompagnement à l’expression des jeunes de 15 à 25 ans, qui témoignent de leur quotidien comme de toute l’actualité qui les concerne.