Petit guide de survie aux repas de famille avec Fabcaro

Petit guide de survie aux repas de famille avec Fabcaro

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Par Lila Blumberg

Publié le

L’auteur de bande dessinée revient avec humour sur les discussions inévitables (ou à éviter) des repas de famille !

“Mais de quoi allons-nous parler ? Et si on n’avait rien à se dire ?”

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C’est la période de l’année où l’on risque d’être le plus confrontés à cette question. Et ça tombe plutôt bien parce que c’est précisément ce dont traite l’auteur de bande dessinée Fabcaro, avec l’humour absurde qu’on lui connaît si bien, dans son dernier livre “Formica – Une tragédie en trois actes” (Editions 6 pieds sous terre) 

Alors, pas de panique et c’est promis : nous allons tous survivre à cette épreuve. Peut-être ne trouverons nous rien à nous dire d’intéressant lors de ce(s) repas mais il ne faudra pas trop s’en faire. Comme l’exprime Fabcaro par son humour absurde poussé à l’extrême, cela ne reflète pas l’amour que nous nous portons, mais relève probablement du vide inexprimable d’une famille normale. En voici quelques exemples !

La discussion politique

Entre ceux qui ont voté Macron mais qui ne sont pas de droite, ceux qui ont voté Macron mais qui sont de gauche et puis ceux qui, de toute façon, ne votent plus parce que “les politiques sont tous les mêmes” mais qui ne manqueront pas de mettre leur grain de sel pour bien veiller à envenimer la discussion… On va en parler, de la politique !

Nous le savons, et l’avons bien remarqué : même lorsqu’une famille est plutôt du même bord, les discussions politiques peuvent avoir tendance à dégénérer à table.

Alors le fameux “Rhaa non, ça va pas, on est tous de droite, du coup la discussion est déjà terminée”, on en rêve mais on n’y croit pas vraiment !

Peut-être serait-il opportun de faire une liste des sujets à éviter, pour la prochaine fois ?

La discussion raciste

Généralement, ça commencera par une réflexion un peu “limite, limite” du tonton facho, suivie d’une réponse raisonnable et assez soft de sa nièce, et puis on en viendra au moment où tonton facho s’égosillera en nous expliquant qu’il ne PEUT PAS ÊTRE RACISTE puisqu’il a un ami noir, mamie s’en mêlera gentiment en se remémorant à voix-haute qu’avant, “« ils » n’étaient pas si mal éduqués et qu’il n’y en avait pas autant dans son quartier”, lorsque d’autres se noieront dans leur verre de vin (oui, vous reconnaissez bien ceux qui ont une inclination pour la bibine) ou iront faire un “petit tour dans la cuisine”…

Et puis, ça se terminera toujours de la même manière : tonton campera sur ses positions, ses détracteurs se sentiront épuisés et dépités, et on assistera à la même discussion au prochain repas de famille (en espérant qu’il ne soit pas programmé dès le lendemain).

Pour les plus téméraires, on peut vous rappeler une phrase bien connue de Charles Bukowski, selon qui : “Ça fait du bien d’affronter de l’hostilité ; ça aide à garder la tête froide“. Et pour les autres, on va vraiment la faire, cette liste des sujets à éviter, n’est-ce pas ?

Les blagues nulles

Est-ce une question de probabilité, de statistique, de hasard, de prédisposition génétique ou tout simplement de conditionnement ? Impossible à dire, mais on en a probablement tous (au moins) une dans notre famille : cette personne un peu lourde, qui sort des blagues de très mauvais goût (“Mais le kwassa-kwassa pêche peu ! Il amène du Comorien”), sexistes (“Ah c’est elle qui casque ! Pour une fois que c’est un homme qui coûte cher, hein ?“) ou juste pas drôles (“Quelle est la différence entre une pute et du taboulé ? … Il n’y en a pas !“)

S’ensuit toujours un silence gênant, voire angoissant, et on remercie tous intérieurement celui qui aura le courage de lancer un “Bon, et sinon … ?”.

En fonction du niveau de la blague, de l’atmosphère générale, et de si l’on en est rendu au stade des huîtres ou de la bûche, on peut envisager de se forcer à rire tous en choeur ; c’est toujours une bonne parade à un silence embarrassant. Ou bien, on peut enfin se mettre d’accord pour lui dire une bonne fois pour toutes qu’il/elle devrait vraiment arrêter ces blagues douteuses.

La composition du menu

Avec les innombrables repas que l’on va devoir partager en famille parce que “c’est convivial de tous se retrouver autour d’une table“, une question va se poser chaque jour, et même plusieurs fois par jour : “qu’est-ce qu’on va bien pouvoir manger ?

Et ce n’est pas un détail car ce menu, on a l’habitude de le partager, et surtout qu’il soit le même pour tout le monde.

Notre mère nous préparera sûrement son traditionnel gratin dauphinois au moins une fois (ceux qui ont lu “Le Discours” de Fabcaro savent), mais elle ne pourra pas le sortir à toutes les sauces.

Nous le savons bien : avant d’entendre notre chère famille se délecter et proférer des “c’est divin !”, “bravo ma chérie”, “un délice, comme toujours“, il va falloir se mettre d’accord sur la composition des mets…

Si mamie à l’habitude de faire attention, parce que Quentin est allergique aux arachides et qu’Ella déteste les poireaux, elle aura peut-être un peu plus de mal à cuisiner sans viande, ni poisson parce qu’Alice est devenue végétarienne. Pauvre Alice… Elle sait d’ores et déjà qu’elle va devoir se contenter des accompagnements, tout en expliquant à son oncle chasseur pourquoi, et surtout comment on fait pour survivre sans régime carné !

Globalement, deux solutions : soit on prend le temps d’expliquer à toute la tablée pourquoi on a décidé de se sustenter sans manger d’animaux, ou du moins d’essayer de faire attention aux conditions dans lesquelles ils sont élevés puis tués. Attention, il peut s’en suivre un long débat. Soit on décide qu’ils nous font tous suer avec leurs questions, et que l’on n’a pas à se justifier de ne pas vouloir goûter au chapon élevé en batterie ou au foie gras d’un canard gavé à la pompe alimentaire.

“Moi, de mon temps…”

Nous sommes d’accord, des enfant qui se plaignent sans cesse et qui martèlent les adultes de leurs “je m’ennuie, je ne sais pas quoi faire”, c’est très irritant. Surtout lorsque ce sont ces mêmes enfants pourris gâtés qui réclament une nouvelle console tous les ans, qui reçoivent plus de cadeaux qu’il n’y a de place dans leur chambre, et qui trouvent encore le moyen de s’ennuyer…

Mais que dire de ces adultes rabat-joie, qui les assènent de réponses immuables, sans varier d’une virgule chaque année : “Moi, de mon temps, on avait une orange et on était très contents tu sais”. “Une paire de chaussettes reprisées et c’était super !” Ah, vous ne vous rendez pas compte de la chance que vous avez !”

Mais que répondre à nos aïeux, nostalgiques d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître ?

On peut envisager de monter sur la table et entonner cette bonne vieille chanson d’Aznavour ! Mais attention : cette option est risquée, il nous a quitté il y a un tout petit peu plus d’un an, maman risque de verser sa petite larme et nous rappeler qu’il nous a quitté trop tôt (94 ans) et que sa préférée c’était “La Bohème”.

Sinon, on s’échine à leur expliquer que ce n’est vraiment pas de notre faute s’ils sont nés avant nous, et qu’on n’est pas responsables d’être né à l’époque de la surconsommation, du réchauffement climatique, et peut-être bien de la fin du monde…

Bon, courage, alea jacta est (“les dés sont jetés” pour ceux qui ont séché les cours de latin), la liste de vos invités doit être bouclée, les menus arrêtés et vous êtes probablement déjà en route pour ces quelques jours de huis clos.

Notez qu’en ces temps de grèves, peut-être que tonton facho n’aura pas son train…

(Merci à Fabcaro pour l’inspiration et les illustrations).