Et pendant ce temps, en Iran, les homosexuels doivent changer de sexe pour survivre

Et pendant ce temps, en Iran, les homosexuels doivent changer de sexe pour survivre

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© JOHANNES EISELE / AFP

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Par Clothilde Bru

Publié le

Parce qu'il n'y a pas que le coronavirus dans l'actualité.

*Chaque jour, Konbini news s’engage à faire de la place à de l’information qui n’a rien à voir avec l’épidémie de coronavirus. Ça s’appelle “Et pendant ce temps” et aujourd’hui, c’est vers l’Iran que notre regard se tourne.

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En Iran, l’homosexualité est pénalisée, réprimée violemment, et même passible de la peine de mort. Lundi 8 mars, plusieurs médias anglophones ont rapporté des pratiques particulièrement alarmantes.

Pour survivre au pays des mollahs, les homosexuel·le·s seraient désormais obligé·e·s de subir une opération de changement de sexe. “Ça fait longtemps qu’on entend parler de ces opérations forcées en Iran”, confirme Sébastien Tüller, responsable de la commission LGBTI à Amnesty International France, interrogé par Konbini news.

Là où le régime iranien va être incroyablement violent à l’encontre des homosexuel·le·s, il serait plus tolérant avec les transidentités, qui sont légales depuis la fin des années 1980. En la matière, la République islamique fait figure de précurseure dans la région.

Selon Lexie Agresti, masterante spécialisée en arts et culture iranienne et militante pour les droits et la visibilité des personnes trans, interrogée par Konbini news : “C’est un écran de fumée pour cacher des opérations forcées.” Dans le tabloïd anglais The Sun, l’activiste iranienne Shadi Amin affirme que des hommes et des femmes homosexuel·le·s sont aujourd’hui obligé·e·s de changer de sexe sous peine d’être exécuté·e·s. 

Que l’État soit à la manœuvre ou non, il y a longtemps qu’en Iran des hommes et des femmes changent de sexe pour tenter d’échapper à la répression liée à leur sexualité. “La pression est incroyablement forte”, confirme Sébastien Tüller.

“Je voulais changer de genre le plus vite possible”

En 2014 déjà, Donya, une Iranienne de 33 ans, témoignait sur la BBC : “Je subissais une pression tellement forte que je voulais changer de genre le plus vite possible.”

“En Iran, l’homosexualité n’existe pas. Les religieux iraniens au pouvoir ont une conception du genre binaire et hétéronormé”, précise Sébastien Tüller, d’Amnesty International. Et donc : “Un homme qui est attiré par un autre homme est en fait une femme, et donc il faut l’aider”, ajoute-t-il.

Dans les colonnes du Sun, Shadi Amin abonde : “Le régime iranien est contrôlé par des extrémistes religieux qui considèrent que l’homosexualité est une maladie.”

“En Iran, la société ne peut être que cisgenre et hétéro. Autoriser les transitions, c’est autoriser la volonté de Dieu”, abonde Lexie Agresti. Et ces opérations sont d’ailleurs financées par l’État iranien, affirme la militante de 24 ans : “La solution de l’État iranien, c’est de créer chirurgicalement des hétérosexuels.”

Si on ne peut pas changer son orientation sexuelle, on change donc son corps. Ça peut sembler ahurissant, pourtant, c’est bien le chemin que sont contraints de prendre un nombre croissant d’homosexuel·le·s. C’est d’ailleurs grâce aux témoignages d’amis que Donya a finalement renoncé à l’opération et choisi de fuir pour la Turquie.

Malgré une législation favorable, il ne faut pas considérer l’Iran comme un “paradis trans”, précise Lexie Agresti. “D’une part, ce n’est pas parce que ces opérations existent qu’il n’y a pas de transphobie. D’autre part, il faut rappeler que ces opérations sont lourdes, intrusives et irréversibles. Le fait que des personnes soient obligées d’y recourir est plus que préoccupant”, déplore Sébastien Tüller.

Le tabloïd anglais évoque 4 000 opérations de changements de sexe par an. Mais ça pourrait être beaucoup plus pour Shadi Amin. Selon Lexie Agresti, les enlèvements et les changements de genre forcés sont très courants. Que ces allégations soient vraies ou fausses, “il est urgent que l’État iranien clarifie la situation”, estime Amnesty International.