“On meurt mal en France” : le gouvernement poussé à se prononcer sur l’euthanasie

“On meurt mal en France” : le gouvernement poussé à se prononcer sur l’euthanasie

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© Boris Zhitkov / Getty Images

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Par Pauline Ferrari

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Avec plusieurs initiatives en faveur d’une légalisation de l’euthanasie, des parlementaires entendent peser sur l’État.

Des parlementaires poussent le gouvernement à se positionner sur l’euthanasie, avec plusieurs initiatives en faveur d’une légalisation, dont une proposition de loi PS qui sera débattue dès jeudi au Sénat.

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Un texte visant “à établir le droit à mourir dans la dignité”, porté par la sénatrice de Paris Marie-Pierre de La Gontrie, a été inscrit dans une “niche” parlementaire du groupe PS. Rejeté par les sénateurs en commission, il ne sera vraisemblablement pas voté dans l’hémicycle du Sénat à majorité de droite, même si un sujet aussi complexe dépasse les clivages partisans.

Mais l’offensive sur le sujet est aussi menée à l’Assemblée nationale. Le 8 avril, une proposition de loi “donnant le droit à une fin de vie libre et choisie” d’Olivier Falorni doit être examinée par les députés, cette fois dans le cadre de l’espace réservé au groupe Libertés et Territoires.

Au sein même de la majorité présidentielle, Jean-Louis Touraine (ex-député PS) a déposé un texte en faveur d’une “aide médicalisée active à mourir” pour les personnes gravement malades et en fin de vie, qui a engrangé le soutien de 164 élus de la majorité. À droite, une proposition de loi visant à affirmer le libre choix de la fin de vie et à assurer un accès universel aux soins palliatifs en France” est portée par la députée LR Marine Brenier.

Le chef de file du groupe LREM Christophe Castaner a d’ailleurs écrit au Premier ministre Jean Castex, comme l’a révélé le JDD, pour réclamer une réunion sur la “fin de vie” et la proposition de loi issue de la majorité, avec l’hypothèse que ce thème soit renvoyé à la campagne présidentielle. “Je suis très touché et très sensible à cette question et je voudrais y revenir le moment venu“, avait pour sa part déclaré le garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti mi-février.

Mais ces nouvelles propositions de loi peuvent s’avérer controversées dans la période actuelle. “Est-ce vraiment le moment ? Quand ceux qui meurent aujourd’hui n’ont même pas droit au respect de leur droit d’être accompagnés ?” du fait de la crise sanitaire, s’interroge sur Twitter la psychologue Marie de Hennezel, engagée dans l’accompagnement de la fin de vie.

Du côté de l’exécutif, la frilosité est de mise

Tous les exécutifs sont toujours un peu frileux sur ces questions sociétales“, constatait l’ancienne ministre de la santé Marisol Touraine il y a quelques semaines, relevant que le droit de mourir dans la dignité était au programme du candidat François Hollande. Emmanuel Macron, quant à lui, n’avait pas pris d’engagement sur cette question en 2017.

Il avait appelé “d’abord à faire pleinement appliquer la loi Claeys-Leonetti” de 2016, qui autorise la “sédation profonde et continue jusqu’au décès” pour des personnes dont le pronostic vital est engagé “à court terme”. “Moi, je souhaite choisir ma fin de vie”, avait toutefois glissé le candidat Macron.

Marie-Pierre de La Gontrie explique que son texte “part du constat de l’insuffisance de l’offre de soins palliatifs, qui fait qu’aujourd’hui, c’est ce que disent les spécialistes, ‘on meurt mal en France'”. Sa proposition de loi vise à reconnaître le droit à bénéficier, sous conditions, de l’aide active à mourir, selon deux modalités : l’assistance médicale au suicide et l’euthanasie. Un texte “très fortement inspiré” par L’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD). “Nous posons un cadre juridique très rigoureux qui restreint cette possibilité aux cas graves, incurables, avérés, infligeant une souffrance psychique ou physique irréversible”, souligne-t-elle.

D’autant que la législation en matière de fin de vie est déjà à l’œuvre dans d’autres pays d’Europe. Fin janvier, le Parlement portugais a adopté une loi autorisant “la mort médicalement assistée”. “Beaucoup de pays d’Europe ont déjà instauré ce type de législation, les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg, la Suisse”, rappelle Marie-Pierre de La Gontrie. C’est d’ailleurs en Suisse que l’ancienne secrétaire d’État aux personnes âgées, Paulette Guinchard, vient de mourir à l’âge de 71 ans après avoir eu recours au suicide assisté.

L’association pro-euthanasie Ultime liberté a annoncé samedi la mise en examen de 11 de ses membres dans une enquête sur un trafic de pentobarbital, un barbiturique interdit en France et parfois utilisé pour l’aide au suicide.

Konbini news avec AFP