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Nicolas Sarkozy condamné à 3 ans de prison dont un an ferme

Nicolas Sarkozy condamné à 3 ans de prison dont un an ferme

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© REUTERS/Gonzalo Fuentes

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Par Astrid Van Laer

Publié le

L’ancien président et ses avocats n’ont fait aucune déclaration à la sortie de la salle.

C’est une décision sans précédent : lundi, Nicolas Sarkozy est devenu le premier ancien président de la Ve République condamné pour corruption, à trois ans de prison dont un ferme, dans l’affaire dite des “écoutes”.

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Il est également le deuxième ex-chef de l’État à être sanctionné par la justice, après son ancien mentor Jacques Chirac, condamné en décembre 2011 à deux ans de prison dans le dossier des emplois fictifs de la ville de Paris.

Nicolas Sarkozy, qui a toujours affirmé n’avoir jamais commis “le moindre acte de corruption”, a écouté le prononcé de sa peine debout face au tribunal, semblant impassible. L’ancien président a fait savoir, par le biais de son avocate en fin d’après-midi, qu’il allait faire appel.

Les juges ont également condamné à la même peine l’ancien haut magistrat Gilbert Azibert et l’avocat historique de l’ex-président, Thierry Herzog, avec 5 ans d’interdiction professionnelle pour ce dernier. Ils ont également été reconnus coupables de violation du secret professionnel.

Nicolas Sarkozy, qui a été “garant de l’indépendance de la justice, s’est servi de son statut d’ancien président pour gratifier un magistrat ayant servi son intérêt personnel”, a déclaré la présidente de la 32e chambre correctionnelle de Paris, Christine Mée, estimant que le “pacte de corruption” était bien constitué.

Le tribunal est resté en deçà des réquisitions du parquet national financier (PNF), qui avait demandé les mêmes peines de quatre ans d’emprisonnement dont deux ferme à l’encontre des trois prévenus. Le patron de ce parquet financier, Jean-François Bohnert, était présent en personne pour le jugement.

Cette première condamnation pour Nicolas Sarkozy intervient alors qu’il doit faire face à nouveau à des juges, dès le 17 mars, au procès de l’affaire “Bygmalion”, portant sur les frais de sa campagne présidentielle de 2012.

Retiré de la politique depuis 2016 mais toujours très populaire à droite, un an avant le prochain scrutin présidentiel, Nicolas Sarkozy est sous forte pression judiciaire. Il est mis en cause dans plusieurs dossiers, dont celui des soupçons de financement libyen de sa campagne victorieuse de 2007.

C’est dans le cadre de cette dernière affaire qu’il avait été placé sur écoute en 2013. Les juges découvrent alors que Nicolas Sarkozy utilise une ligne téléphonique secrète, ouverte sous l’alias de “Paul Bismuth”, pour communiquer avec son avocat Thierry Herzog.

Une dizaine de leurs conversations ont été retranscrites. Pour le tribunal, elles prouvent bien qu’un “pacte de corruption” a été conclu entre Nicolas Sarkozy, son avocat et Gilbert Azibert.

Informations privilégiées

Les juges ont estimé que l’ex-président s’était rendu coupable de corruption, en promettant d’appuyer la candidature de Gilbert Azibert pour un poste de prestige à Monaco, en échange d’informations privilégiées, voire d’une influence sur un pourvoi en cassation qu’il a formé.

L’ancien locataire de l’Élysée voulait alors faire annuler la saisie de ses agendas présidentiels après avoir obtenu un non-lieu dans l’affaire Bettencourt. Gilbert Azibert, avocat général dans une chambre civile, n’intervenait pas directement dans ce dossier mais il a selon le tribunal joué de ses relations.

Lors du procès qui s’est achevé le 10 décembre, la défense s’était insurgée contre un dossier basé sur des “fantasmes” et des “hypothèses” et avait plaidé à l’unisson la relaxe des prévenus.

Elle avait fait valoir qu’in fine, Nicolas Sarkozy n’a pas eu gain de cause devant la haute juridiction et que Gilbert Azibert n’a jamais eu de poste à Monaco. Selon la loi, il n’est cependant pas nécessaire que la contrepartie ait été obtenue, ni que l’influence soit réelle, pour caractériser les délits de corruption et de trafic d’influence.

Tout au long du procès, dans une ambiance houleuse, la défense avait pilonné un dossier “poubelle”, réclamant l’annulation de la totalité de la procédure, basée selon elle sur des écoutes “illégales” car violant le secret des échanges entre un avocat et son client.

Les avocats des prévenus avaient aussi torpillé une enquête préliminaire parallèle menée par le PNF. Visant à identifier une éventuelle taupe ayant pu informer en 2014 Thierry Herzog que la ligne Bismuth était “branchée”, elle a conduit à faire éplucher leurs factures téléphoniques détaillées.

Elle a été classée sans suite près de six ans après son ouverture. Trois magistrats du parquet financier, notamment son ancienne cheffe Eliane Houlette, sont visés depuis septembre par une enquête administrative, dont les conclusions sont imminentes.

Dans ce contexte tendu, Jean-François Bohnert était venu en personne le jour du réquisitoire pour défendre l’institution tout juste créée quand l’affaire des “écoutes” a éclaté, et assurer : “Personne ici ne cherche à se venger d’un ancien président de la République.”

Konbini news avec AFP – Article publié à 14h13 et modifié à 17h06 avec ajout de la décision de Nicolas Sarkozy de faire appel.