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Comment ma misophonie me gâche la vie

Comment ma misophonie me gâche la vie

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Image d’illustration : © Liza Summer / Pexels

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Par La Zep

Publié le

Manel ne supporte pas certains bruits : ça s’appelle la misophonie. Ça a l’air anodin, mais au quotidien, ça lui gâche la vie.

Les notifications des téléphones, les bruits des claviers, des souris… Il y a du bruit partout. À cause de ça, je suis dans un état d’alerte permanent, et c’est compliqué à gérer au quotidien.

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La première fois que j’ai entendu parler de la misophonie, c’était en lisant un article de psychologie sur Facebook. Par curiosité et pour connaître la définition de ce mot, j’ai lu, et j’ai su que j’étais misophone. Enfin ! J’avais mis un nom sur ce trouble qui me gâche la vie depuis tant d’années.

Pour être sûre, je me suis empressée d’aller lire des témoignages sur le web et je me suis parfaitement reconnue. Je n’étais pas seule, d’autres personnes vivaient ça !

Des bruits normaux aux yeux des autres

La misophonie, c’est un trouble psychologique qui signifie littéralement “la haine du son”. Certains bruits bien spécifiques peuvent déclencher des réactions disproportionnées. Par exemple, moi, j’ai horreur des bruits de clavier, de souris, de bouche, les raclements de gorge, le grincement des fourchettes, les gens qui mâchent bruyamment leur chewing-gum, les bruits de fond du quotidien… Et j’en oublie encore certainement.

Ce sont des bruits du quotidien, des bruits normaux pour les autres, qu’on entend fréquemment. Mais, pour moi, en entendre un, qui plus est de manière répétitive, me met hors de moi et engendre des émotions négatives comme la colère, l’anxiété et la haine. Parfois même, j’en deviens agressive et je culpabilise.

Étrangement, quand c’est moi qui fais ces bruits, ça ne me dérange pas, mais quand ce sont les autres, c’est autre chose.

Il faut le vivre pour le comprendre

On m’a toujours dit que j’étais bizarre, que ce n’était pas normal d’être comme ça, que j’abusais parfois aussi. C’est dur, parce que les autres ne comprennent pas le désarroi dans lequel ça me met. Ça reste encore un trouble méconnu. La misophonie, c’est comme tout autre trouble : il faut le vivre pour le comprendre.

Dans le bus, il suffit que quelqu’un mâche un chewing-gum bruyamment pour que je me sente crispée et tendue. À table, c’est la même chose : je ne supporte pas les bruits de mastication. Du coup, j’ai mis en place une stratégie d’évitement – à chaque fois que c’est possible – qui consiste à m’éloigner de ces bruits qui me dérangent. À long terme, ça m’a fortement isolée des autres et je suis devenue très irritable et anxieuse. Ça a généré en moi une anxiété sociale.

Il n’existe pas de traitement efficace contre la misophonie et les origines sont assez méconnues par les professionnels de santé, d’après mon généraliste. Du coup, j’ai essayé diverses techniques pour remédier à ce problème. J’ai essayé de supporter les bruits coûte que coûte en me forçant à les écouter de manière prolongée, mais rien n’y a fait.

Plus le bruit s’amplifie, plus ma colère et mon aversion pour le bruit augmentent. C’est une obsession du bruit. Ça me rend crispée, nerveuse et tendue. J’en suis même arrivée à devoir prendre des anxiolytiques pour me calmer tellement ça me mettait dans tous mes états, mais ça ne règle pas le problème de fond.

Des boules Quies, ou la nature

Quand je ne peux pas m’éloigner, je mets mes écouteurs et j’écoute de la musique, ou une séance de relaxation pour me calmer. Ça peut être n’importe quelle musique, du moment que ça couvre le bruit qui m’agace. Au moins, de cette manière, je pense à autre chose. L’application Petit Bambou m’aide aussi beaucoup. La nuit, pour ne pas entendre les bruits avoisinants, je dors avec des boules Quies. C’est le seul moyen que j’ai trouvé pour passer des nuits calmes et complètes. Un vrai bonheur depuis que j’en utilise !

Aussi, je passe beaucoup de temps dans la nature, ça me détend. La nature, c’est le seul endroit où je suis sûre de ne trouver aucun bruit dérangeant, si ce n’est le chant des oiseaux, le bruissement des arbres ou l’écoulement d’une rivière. Oui, ce sont des bruits, mais ceux-là ne me dérangent pas. Au contraire, ils m’apaisent. Je ne sais pas pourquoi.

Je ne sais pas d’où vient cette haine pour certains bruits, je ne sais pas pourquoi je suis comme ça. En vérité, j’ai toujours détesté le bruit mais ça s’est fortement aggravé au fil des années.

Je ne sais pas si ça va partir un jour, mais, en attendant, la nature est devenue mon échappatoire pour me ressourcer et profiter du calme, loin de toute l’agitation du quotidien.

Manel, 25 ans, en recherche d’emploi, Perpignan

Ce témoignage provient des ateliers d’écriture menés par la ZEP (la zone d’expression prioritaire), un média d’accompagnement à l’expression des jeunes de 15 à 25 ans, qui témoignent de leur quotidien comme de toute l’actualité qui les concerne.