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En Autriche, des lettres du père d’Hitler découvertes dans un grenier

En Autriche, des lettres du père d’Hitler découvertes dans un grenier

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© Alex Halada / AFP

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Par Pauline Ferrari

Publié le

Annelise Smigielski a retrouvé des dizaines de lettres signées de la main d’Alois Hitler.

C’est un appel surprenant qu’a reçu l’historien autrichien Roman Sandgruber : une femme l’a contacté, disant avoir déniché dans son grenier des lettres centenaires écrites par le père d’Adolf Hitler. L’historien s’est d’abord montré méfiant. “Au début, j’étais plutôt sceptique : on sait très peu de choses sur la jeunesse” du Führer “et encore moins sur son père”, avoue à l’AFP ce spécialiste, qui s’attendait à tomber sur une découverte farfelue.

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Pourtant, la correspondance jaunie s’est vite révélée authentique : écriture soignée, timbres d’époque, signature tristement célèbre et même cachets de cire intacts… Les 31 lettres étaient bien de la main d’Alois Hitler, rédigées du temps de l’Empire austro-hongrois, à l’attention d’un certain Josef Radlegger, employé des Ponts et Chaussées.

“Il y a une atmosphère très familière entre les deux correspondants qui se racontent beaucoup de ragots”, explique Roman Sandgruber à la bibliothèque universitaire de la ville de Linz, en manipulant délicatement les missives. Alois Hitler voulait racheter à Josef Radlegger une ferme dans un village de Haute-Autriche en 1895, six ans après la naissance d’Adolf.

Un nouvel éclairage sur l’enfance d’Adolf Hitler

Selon les historiens, il était connu qu’Alois, né hors mariage, était un “chef de famille tyrannique”. Cependant, ces échanges offrent un nouvel éclairage, celui “d’une vie familiale qui n’était pas toujours désagréable”. Les lettres donnent aussi une image différente de la mère, Klara, dépeinte par Adolf Hitler comme une tranquille “petite ménagère” dans son livre Mein Kampf.

Klara, l’une des rares personnes à ne pas subir les foudres d’Alois, apparaît dans ses courriers comme “une femme profondément émancipée, comme on dirait aujourd’hui”, selon Roman Sandgruber. “Ma femme aime être active et possède un certain enthousiasme ainsi qu’une bonne compréhension de la chose économique”, écrit ainsi Alois Hitler à son partenaire commercial.

Les traces laissées par le fonctionnaire des douanes témoignent aussi de son ascension sociale et d’une soif de respectabilité locale passant par la propriété terrienne. Bien que le chercheur se garde d’établir des comparaisons hâtives entre Alois et son fils, il voit en eux un point commun : ce sont des “autodidactes” revendiqués. “Tous les deux méprisaient ceux qui avaient suivi une scolarité classique – les universitaires, les notaires, les juges, et plus tard même les officiers militaires”, dit-il, ajoutant qu’ils se prenaient pour des “génies”.

Roman Sandgruber est plus prudent sur les racines de l’antisémitisme d’Adolf Hitler : des propos haineux du père envers les Juifs ont bien été retrouvés plus tard dans sa vie, mais l’historien évoque plus largement l’influence sur le futur dictateur nazi d’un racisme répandu dans la société autrichienne de l’époque.

Une découverte au détour de travaux

Une découverte permise grâce… à des travaux d’isolation thermique. Il y a quelques années, une Autrichienne, Annelise Smigielski, décide d’isoler le plancher de son grenier et vide les combles, à mille lieues de se douter de ce qui reposait sous son toit. Elle savait que son arrière-arrière-grand-père, Josef Radlegger, avait vendu des biens à Alois Hitler, mais elle ne pensait pas tomber sur son écriture, au milieu d’un tas de courriers jamais exploré.

Il lui a rapidement semblé que le père Hitler “s’énervait de tout”, raconte-t-elle à l’AFP, en ajoutant que l’écriture était difficile à déchiffrer. Connaissant les précédentes recherches de Roman Sandgruber, elle a trouvé préférable de lui confier ces archives en 2017.

Ces découvertes ont permis à l’universitaire de 74 ans d’écrire la première biographie du patriarche Hitler, né en 1837 et mort en 1903. Adolf était alors tout juste âgé de 14 ans. Le livre en allemand (non traduit) a été publié le 22 février. Un événement, puisqu’à ce jour, ces courriers sont les très rares connus du père du dictateur, qui a eu huit enfants de trois mariages différents.

Annelise Smigielski et Roman Sandgruber ont été surpris par l’attention internationale autour de ce livre, dont la presse parle du Pérou jusqu’en Chine. Mme Smigielski se dit même un peu dépassée par les sollicitations des journalistes. Elle a l’impression d’être “un lapin pris dans les phares”. “Mais bon, ça va se calmer”, croit-elle. Ce ne sera peut-être pas le cas tout de suite : l’ouvrage est entré dans sa deuxième phase d’impression une semaine seulement après sa parution, victime de son succès.

Konbini news avec AFP