En Inde, les violences sexistes tueraient près de 240 000 fillettes chaque année

En Inde, les violences sexistes tueraient près de 240 000 fillettes chaque année

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(© Yann Forget / Wikimedia Commons / CC-BY-SA-3.0)

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Par Clothilde Bru

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“L’Inde est une société patriarcale où les garçons sont favorisés.”

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En l’espace d’une semaine, trois adolescentes ont été violées, puis brûlées en Inde. Ces affaires ont fait la une de la presse indienne et connu un certain retentissement en Europe.

À cette actualité abjecte s’ajoute une étude publiée par la revue scientifique The Lancet, selon laquelle 239 000 Indiennes de moins de 5 ans meurent tous les ans à cause de discriminations sexistes. Kamala Marius, maîtresse de conférences en géographie à l’université Bordeaux-Montaigne et spécialiste des questions de genre et de développement urbain en Inde, explique à Konbini news :

“L’Inde est une société patriarcale où les garçons sont favorisés, notamment dans la religion hindoue. On a toujours préféré avoir des garçons plutôt que des filles, parce que ce sont les garçons qui assurent les rites funéraires, et ce sont les garçons qui sont censés s’occuper des parents, puisque quand on se marie en Inde, la fille part dans la famille de son mari.”

Elle a longuement expliqué ces phénomènes dans son livre Les Inégalités de genre en Inde. Pour résumer, il y a plus de garçons que de filles en Inde, parce qu’on s’occupe mieux des garçons. Les négligences peuvent prendre la forme d’un manque de soins, d’une absence de vaccinations ou de malnutritions, comme le résume Franceinfo.

“Il y a plus de garçons que de filles qui naissent”

L’Inde est un pays où il y a une “surmasculinisation” des naissances : “Il y a un sexe-ratio très en défaveur des filles, c’est-à-dire qu’il y a plus de garçons que de filles qui naissent”, explique Kamala Marius. De nombreux avortements ont en effet lieu en raison du sexe du bébé. Et on a longtemps pratiqué des infanticides.

Le fait de privilégier les garçons était lié à la loi : ce sont ces derniers qui héritaient des terres. Mais depuis 2005, une loi cherchant à rétablir l’égalité femmes-hommes garantit que les terres appartiennent autant aux fils qu’aux filles. Toutefois, dans la réalité, la tradition a tendance à perdurer, “surtout dans les milieux ruraux”, précise Kamala Marius. La situation est loin d’être homogène :

“Il y a des grandes différences entre les États du Nord et du Sud. Dans le Sud, il y a quasiment autant de filles que de garçons qui naissent. L’éducation des filles est plus développée, elles vont à l’école, et les femmes travaillent.”

Pour la chercheuse, les mentalités sont néanmoins en train d’évoluer. Le fait que les récentes affaires de viols aient particulièrement ému la société indienne en atteste :

“Il y a eu des manifestations. Différentes couches de la population ont participé : des femmes issues de milieux urbains, des intellectuelles, l’élite de la société, des représentantes de mouvements féministes, mais aussi beaucoup d’hommes.”