Dans la peau de Melania Trump

Dans la peau de Melania Trump

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(c) DoD photo by U.S. Air Force Staff Sgt. Marianique Santos

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Par Astrid Van Laer

Publié le

La première dame américaine fête ses 48 ans aujourd’hui.

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Si Geneva Eisenhower, femme du 34e président des États-Unis, disait clairement : “Ike dirige le pays et moi, je retourne les côtes d’agneau”, le silence et la discrétion de Melania Trump rendent son rôle bien plus flou et alimentent tous les fantasmes. Tantôt victime, tantôt bras droit, qui est vraiment Melania ?

“Il semble qu’on ait affaire à une jeune femme très intelligente qui n’avait pas prévu de jouer ce rôle et n’a pas encore complètement décidé de ce qu’elle veut en faire”, confiait à l’AFP la professeure de sciences politiques au Iona College de New York, Jeanne Zaino.

Les nombreux témoignages anonymes de “proches” de la première dame dépeignent une victime. On la lit “malheureuse”, avec une “vie misérable”. “Ce n’est pas son rêve, c’est celui de Donald”, a-t-on pu lire.

“Elle ne peut rien faire”

Interviewée par Europe 1 ce 26 avril, la première dame française Brigitte Macron, en visite d’État à Washington, a dressé un portrait élogieux de Melania Trump et en a dit plus sur sa personnalité : “C’est une femme extrêmement gentille, charmante, intelligente et très ouverte. Elle est très gaie, toutes les deux, on rit beaucoup, alors qu’on ne la voit pas forcément rire officiellement parce qu’elle s’empêche de le faire.” Puis l’épouse du président français a évoqué un protocole américain étouffant :

“Parce que tout est interprété, surinterprété. C’est une femme qui a beaucoup de caractère, qu’elle s’applique à cacher. Je pense qu’elle est beaucoup plus contrainte que moi. J’ai beaucoup plus de liberté qu’elle parce qu’elle ne peut rien faire, à cause de la sécurité. Et quand on perce ce mur de la sécurité, elle est totalement elle-même.

Elle a une vie, il faut imaginer, je vous donne un petit exemple concret : elle ne veut pas ouvrir une fenêtre à la Maison-Blanche. Parce qu’immédiatement, le service de sécurité appelle en disant ‘fermez immédiatement’.”

Des propos qui corroborent ceux de Jean-Éric Branaa, chercheur à l’IRIS, maître de conférences à Assas et auteur de 1968, Quand l’Amérique gronde (éd. Privat). Joint par téléphone, ce dernier confirme :

“Concernant les problèmes de sécurité évoqués par Brigitte Macron, c’est une thématique très présente aux États-Unis. Ces questions sont réglées par les services de sécurité de la CIA, qui donnent des ordres et elle est au-dessus du Président, contrairement à la France, où Emmanuel Macron nomme les gens qui sont en charge de sa sécurité.”

“Si on veut atteindre le président, on peut le faire en tuant sa femme” poursuit-il pour expliquer cette “protection démesurée” avant de rappeler : “on se souvient d’Hillary Clinton, première dame qui sortait à vélo avec une perruque et des lunettes noires. Elle se plaignait de ne plus avoir de vie.”

Un silence qui alimente les rumeurs les plus folles

Qui ne dit mot consent ? Sa personnalité en apparence énigmatique est en partie due à sa discrétion, contrairement à Michelle Obama, peu avare en apparitions médiatiques. Il est bien connu que l’on peut faire dire ce que l’on veut à quelqu’un qui ne parle pas. En outre, mises à part quelques informations biographiques classiques, rien ne transparaît de sa personnalité.

Pour Katherine Jellison, historienne à l’Ohio University, “pour trouver une première dame aussi énigmatique que Melania Trump, il faut remonter à la fin des années 1940, début des années 1950”. Interrogée par l’AFP, elle expliquait :

“Les Américains n’ont pas l’impression encore de vraiment la connaître. Elle fait profil bas, […] est moins présente sur les réseaux sociaux que ses prédécesseures, et aussi parce qu’il y a beaucoup de spéculations sur ses relations avec le président.”

C’est le 26 avril 1970 qu’est née Melania Klauss. Cette année-là, son futur époux a 23 ans et s’essaie à la production pour des shows à Broadway avec la comédie “Paris is out!”. Elle grandit en Slovénie auprès de ses parents. 1998. Melania est depuis quelques années aux États-Unis où elle est mannequin. Elle a 28 ans et se rend au Kit Kat Club à New York où elle rencontre Donald Trump à une fête organisée par un patron d’agence de top models.

Venu en compagnie d’une autre femme, le quinquagénaire milliardaire aurait d’abord essuyé un refus de la part de sa future épouse, avant de parvenir à la séduire. Quelques années plus tard, en 2002, elle passe trois heures dans son pays natal en compagnie de son fiancé M. Trump, qui rencontre ses parents.

En épousant Donald Trump, elle devient la seconde première dame de l’histoire des États-Unis à être née à l’étranger, après Louisa Adams, l’épouse du sixième président des États-Unis, John Quincy Adams. En 2008, leur fils Barron voit le jour. Polyglotte, Melania Trump parle l’anglais, le slovène, l’allemand, l’italien et le français. Voici à peu près tout ce à quoi est régulièrement réduite la vie de Melania Trump.

C’est ce qui pourrait avoir motivé de nombreuses rumeurs. L’image d’une Melania Trump, emprisonnée dans sa tour d’ivoire par un méchant mari, s’est petit à petit dessinée. Dès l’accession au pouvoir de son mari, Melania Trump a surpris en attendant cinq mois avant d’emménager à la Maison-Blanche, laissant la chronique s’enflammer.

Mais bien d’autres fausses idées, plus folles encore, ont vu le jour. En novembre dernier, une théorie avait enflammé les réseaux sociaux : il y aurait une fausse Melania Trump, une doublure de la première dame :

“Ce n’est pas Melania. Penser qu’ils puissent aller aussi loin et essayer de nous faire croire que c’est elle à la télé est juste dingue. Du coup, je me demande sur quoi d’autre on nous ment.”

Une théorie plausible selon Jean-Éric Branaa :

“Quand on connaît l’histoire du pays et que l’on sait qu’il y a eu beaucoup de morts violentes et de tentatives d’assassinats, y compris certains présidents.

À un moment donné, les appels au meurtre sur la personne de Donald Trump et de sa femme s’étaient multipliés, par conséquent, connaissant l’histoire du pays et la paranoïa des services secrets, la possibilité d’un sosie de Melania Trump n’est absolument pas à écarter.”

Ivanka versus Melania

Dans un livre intitulé The Trump White House: Changing the Rules of the Game, l’ami du chef d’État et ancien journaliste Ronald Kessler dévoile lui aussi une personnalité bien différente de celle que l’on voudrait attribuer à Melania Trump. Il parle d’une “force très puissante dans les coulisses”. “Elle est très intelligente. Elle assiste réellement aux réunions, résume ce que les autres ont dit et développe ensuite sa propre stratégie. Elle a des désaccords avec Trump”, poursuit-il.

Selon lui, tout ce qui est dit pour décrédibiliser Melania Trump est faux. “Quand elle donne son avis, c’est toujours en plein dans le mille” :

“Je pense que les gens sous-estiment son influence et son sens politique inné. Quand elle pèse sur une décision, ce n’est pas juste un oui ou juste un non. Elle semble avoir toujours l’instinct pour la bonne décision, la bonne personne au bon moment. […] Elle sait où il est, où il doit être et comment faire évoluer un problème.”

Toutefois, en novembre dernier, lorsque des internautes cherchent à interpeller le président sur le sort des immigrés, c’est par le biais d’Ivanka Trump qu’ils tentent le coup et non celui de sa belle-mère. Et pour cause : c’est sa fille qui est sa conseillère.

Ivanka Trump, née de son union avec Ivana Trump, est politiquement beaucoup plus influente. Quand Melania Trump a organisé une table ronde sur les opiacés ou pris quelques fois la parole pour prendre position contre le cyberharcèlement depuis son arrivée à la Maison-Blanche, sa fille tient un vrai rôle, tout comme son époux. Sur Google, nombreux d’ailleurs sont les articles titrés “Et si c’était Ivanka Trump, la vraie First Lady de Donald ?” ou encore “Ivanka Trump, la véritable première dame des États-Unis”.

“Je pense que Melania Trump n’a absolument aucune influence sur son mari”, explique Jean-Éric Branaa, “contrairement à sa fille Ivanka”. “Il a même dit lui-même qu’Ivanka était la personne qu’il écoutait le plus au monde”.

Selon lui, Melania Trump est en réalité dans la parfaite lignée de ses prédécesseures en n’occupant aucune fonction politique et il s’agirait “d’un faux procès que de lui reprocher de ne pas avoir de rôle politique auprès de son mari” :

“D’abord, en réalité, il n’y a pas de rôle de First Lady avec un cahier des charges, un rôle précis. On a tendance à penser qu’elle a un bureau, un secrétariat et qu’elle travaille, qu’elle dispose d’un budget, mais ça n’existe pas, c’est de l’ordre du fantasme.

Et contrairement à ce que l’on pense, Michelle Obama n’avait pas de poids politique non plus. Le premier rôle, c’est d’être l’épouse de son mari, tout comme ce serait celui d’un homme d’être l’époux de sa femme cheffe d’État.”

Résistance !

Les rumeurs d’infidélités qui pèsent sur son mari dans l’affaire dite “Stormy Daniels” lui ont donné une image plus clémente et les nombreuses vidéos la montrant refuser de prendre la main de son conjoint en public ont façonné l’image d’une femme prisonnière de son époux, mais résistante. Il lui reste désormais encore presque trois ans pour que nous puissions enfin percer tous ces mystères.