Les États européens vont poursuivre leur politique de surpêche en 2020

Les États européens vont poursuivre leur politique de surpêche en 2020

Image :

© CHARLY TRIBALLEAU / AFP

photo de profil

Par Clothilde Bru

Publié le

Les ministres européens de la pêche ont fixé les limites de captures de poissons pour l’an prochain, et ça sent pas bon.

Le Parisien-Aujourd’hui en France, Usbek & Rica, France Culture et Konbini News s’engagent pour la planète avec l’initiative #SauverLePrésent. Une fois par mois, nos quatre médias associeront leurs forces pour alerter sur l’urgence écologique et proposer des solutions.

À voir aussi sur Konbini

2020 est à quelques encablures. Et de nombreux accords internationaux s’étaient fixé cette date butoir pour atteindre leurs objectifs. Spoiler : 2020 ne sera peut-être pas l’année de tous ces grands changements.

Mardi 17 décembre, les 28 ministres en charge de la pêche des États membres de l’Union européenne (UE) se sont réunis afin de fixer les limites de captures de poissons pour l’année prochaine.

Il s’agissait de s’entendre sur la mer du Nord et l’Atlantique. Après une nuit d’âpres négociations, les 28 ministres ont rendu leur copie mercredi 19 décembre au petit matin.

Le jeune Virginijus Sinkevicius, 29 ans, fraîchement nommé Commissaire européen à l’environnement, aux océans et à la pêche, a déclaré : “Des hausses significatives ont été acceptées pour 25 stocks, ce qui est important pour les pêcheurs”, comme le rapporte le journal La Croix. 

Du côté des ONG, c’est l’incompréhension. Pour elles, c’est donc une nouvelle fois les intérêts économiques qui l’emportent sur la sauvegarde de la planète. C’est d’autant plus décevant que l’UE s’était engagée à ce que, dès 2020, tous les poissons soient pêchés au “rendement maximal durable” (RMD).

En soi, l’objectif n’a rien d’absurde. Il s’agit de fixer une quantité limite au-delà de laquelle, pêcher mettrait en péril nos ressources maritimes.

Loupé. Même si ce sont surtout des baisses de quotas qui ont été enregistrées au terme de cette rencontre, les comptes ne sont pas bons.

Dommage pour le cabillaud

“Le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, Didier Guillaume, a défendu la préservation de la viabilité économique et sociale de toute la filière pêche française, dans un contexte de forte tension sur certains stocks”, peut-on lire en préambule d’un communiqué de presse publié dans la foulée par le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation français.

Ainsi, alors que les quotas de pêche baisseront dès 2020 pour le merlan et le cabillaud, la “France a obtenu la mise en place d’une période transitoire de 5 mois (jusqu’au 1er juin) permettant aux pêcheurs impactés d’identifier d’autres mesures de sélectivité pour protéger le cabillaud.”

© Diana Miller/Getty images

Selon Ouest-France, une véritable guerre s’est jouée sur la protection des cabillauds en mer Celtique (le nom de la partie de l’océan Atlantique qui borde le Sud de l’Irlande).

“La Commission proposait une coupe drastique du quota, de 88 %, pour ces zones de pêche. Finalement, une baisse de moitié a été retenue par rapport au quota de 2019, qui était de 1 610 tonnes”, écrit le quotidien régional.

En effet les ministres ont négocié sur la base de recommandations rédigées par la Commission européenne.

La lutte contre le réchauffement climatique

Pour le reste, l’églefin, les raies ou encore les soles pourront être pêchées plus qu’en 2019 dans certaines zones. L’année prochaine en mer du Nord et dans l’océan Atlantique, la surpêche devrait encore toucher 35 % des espèces spécifiques dans une zone donnée, résume Le Monde. Ce n’est pas beaucoup moins qu’en 2019, où ce pourcentage s’élevait à 40 %.

Les limites fixées par les ministres suggèrent que les efforts pour mettre fin à la surpêche sont au point mort, voire inversés“, a déclaré Andrew Clayton, un représentant de l’ONG Pew Charitable Trusts, interrogé par The Guardian. Dans un communiqué de presse, l’ONG Client Earth accuse quant à elle les dirigeants européens de mettre en danger certains stocks de poissons disponibles.

“Cela comprend plusieurs stocks vulnérables, comme le merlan de la mer d’Irlande et la morue (du cabillaud séché et salé) à l’ouest de l’Écosse et dans la mer Celtique. Depuis près de deux décennies les scientifiques suggèrent qu’il ne devrait pas y avoir de quotas pour ces espèces, mais les ministres ont continué à ignorer cet avis”, déplore-t-elle.

Pourtant la question de la pêche est déterminante pour lutter contre le réchauffement climatique. En effet, plusieurs chercheurs ont déjà expliqué comment la protection des stocks de poissons rétablit un équilibre sain dans les mers, ce qui permet à celles-ci de stocker plus de carbone et donc d’absorber la chaleur.