Ce professeur vénézuélien pousse un coup de gueule après avoir réalisé qu’il lui faudrait 4 mois de salaire pour réparer ses chaussures. Son enfer est celui de beaucoup d’autres depuis que l’inflation explose jusqu’à 1 000 000 % au Venezuela.
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Le sang de José Ibarra n’a fait qu’un tour le 29 juin dernier. Ce professeur d’université au Venezuela a partagé son coup de gueule sur Twitter : “Je n’ai pas honte de le dire : c’est avec ces chaussures que je me rends à l’UCV (Université centrale du Venezuela) pour enseigner. Mon salaire de professeur d’université n’est pas suffisant pour faire changer la semelle”.
No me da pena decirlo: con estos zapatos me traslado a la #UCV a dar clase. Mi sueldo como profesor universitario no me alcanza para pagar el cambio de suela pues sale en 20 millones pic.twitter.com/jZP5rDxYVV
— José Ibarra (@Ibarraorellanes) 29 juin 2018
Cet homme de 41 ans est docteur en santé publique, il gagne 5,9 millions de bolívars par mois (environ 50 euros). C’est à peine de quoi s’acheter un kilo de viande dans ce pays où l’enfer de l’inflation n’a aucune limite. Elle devrait atteindre 1 000 000 % d’ici la fin de l’année selon le Fonds monétaire international (FMI).
20 millions de bolívars pour réparer ses chaussures
Pour réparer ses chaussures, on lui demande 20 millions de bolívars… une somme qu’il ne possède pas.
Lluvia Habibi, son cordonnier, explique que les prix sont élevés car les fournisseurs de matériaux les rehaussent sans arrêt. “Les gens peuvent recoller les chaussures, mais presque personne ne peut se payer un changement de semelles, qui coûte déjà 20 ou 30 millions (de bolivars). Beaucoup de personnes repartent sans pouvoir le faire”, explique ce dernier à l’AFP.
Depuis la publication de son message, un vent de solidarité souffle sur José Ibarra. Ses mocassins aux semelles décollées totalisent plus de 11 000 retweets. Le professeur reçoit des dons de chaussures, neuves et usées, des habits, de l’argent et des centaines de messages. José Ibarra décide alors de lancer le mouvement “Chaussures de la dignité” pour aider les mal chaussés.
“J’ai déjà reçu douze paires de chaussures, dont neuf ont déjà trouvé preneur.”
“Le tweet était une explosion de frustration. J’ai pensé que comme je n’avais pas beaucoup d’abonnés, personne n’allait le voir, mais j’ai déjà reçu douze paires de chaussures, dont neuf ont déjà trouvé preneur (auprès de collègues), des habits et de l’argent. J’ai lancé le mouvement car je continue à recevoir des dons”, a expliqué le professeur. Lui a gardé deux paires de chaussures de ville et des baskets.
L’argent donné est remis aux professeurs les plus nécessiteux pour qu’ils puissent acheter à manger, “plusieurs d’entre eux se sont évanouis car ils ne mangent pas à leur faim”, explique le professeur à l’AFP. Il dit avoir perdu 15 kilos depuis le début de la crise.
Faute de bus, José Ibarra use ses semelles sur le bitume comme environ 87 % de la population. Parce que 90 % des transports publics au Venezuela sont paralysés.
Depuis trois semaines, des enseignants d’université font grève par intermittence pour demander des hausses de salaires.