Témoignage : LGBTQI+, notre groupe d’ami·e·s est un bouclier

Témoignage : LGBTQI+, notre groupe d’ami·e·s est un bouclier

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© Josè Maria Sava / Unsplash

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Par La Zep

Publié le

Mes ami·e·s et moi sommes LGBTQI+. Notre amitié nous permet de nous sentir plus fort·e·s pour faire face au regard des autres.

Le safe space est un endroit où l’on peut être soi-même, parler de n’importe quel sujet ou aborder n’importe quel problème sans être jugé·e par quelqu’un d’autre. Avec des ami·e·s, on a créé notre propre safe space : notre groupe. Nous nous sommes rencontré·e·s en militant pour des actions LGBTQI+.

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Nous sommes cinq : Loan, qui est transgenre FtM (Female to Male, c’est-à-dire qu’il a été assigné femme à la naissance), Mélanie qui est transgenre MtF (Male to Female, assignée homme à la naissance), Sam qui est transgenre non-binaire (c’est-à-dire qu’iel n’est pas dans une binarité de genre, dans son cas iel est genderfluid : iel se définit différemment selon les jours), Anaël est transgenre non-binaire (il y a beaucoup de non-binarités différentes, iel ne se définit pas grâce à un genre) et il y a moi, je suis une femme queer.

Notre safe space s’est installé naturellement. Chacun·e, nous nous aidons en parlant, en nous hébergeant si besoin ou en étant tout simplement bienveillant·e·s les un·e·s envers les autres, parce que vivre avec une étiquette imposée n’est pas facile.

À notre naissance, on nous assigne un genre et on nous dit : “Tu seras comme tel et tu aimeras telle chose.” C’est impossible de jouer un rôle toute notre vie. Alors, comment faire lorsque nos proches ne nous acceptent pas tel·le·s que nous sommes ? Continuer de jouer un rôle ? Jusqu’à quand ?

Ma chambre, là où les mots de son père ne peuvent pas l’atteindre

Mon ami transgenre, Loan, a très peu confiance en lui et a du mal à s’accepter tel qu’il est. Il se fait mégenrer par sa famille proche (ses parents, son frère, etc.). La dernière fois que je suis allée chez lui, lorsque ses parents sont arrivés ils l’appelaient avec insistance par son dead-name et le genraient systématiquement mal. Le dead-name, c’est le prénom de naissance, souvent changé par les personnes transgenres. Ce safe space est donc très important pour lui : il peut être lui-même.

Lorsqu’on est entouré·e·s de ce safe space, on craint moins le regard des autres, les agressions dans la rue (car, oui, cela arrive qu’une personne se fasse agresser en raison de sa transidentité). On se sent rassuré·e et plus fort·e. Je me souviens du dernier Noël passé en famille, mon oncle avançait des propos homophobes devant mon/ma cousin·e (qui prend les choses très à cœur) et je voyais bien que cela l’atteignait, alors je lui ai proposé que l’on s’isole dans ma chambre, là où les mots de son père ne pouvaient pas l’atteindre.

En groupe, on est plus fort·e·s

De mon côté, en tant que femme queer, mes ami·e·s m’aident à me confier ou m’accompagnent dans mes actions, pour militer pour la cause LGBTQI+. Car, sans elleux, je ne ferais pas toutes ces manifestations ou tous ces gestes pour militer. Par exemple, avec mon/ma cousin·e Sam, nous collons des Post-it en forme de cœur avec des messages d’amour sur des stickers prônant la haine dans Paris. Jamais je n’aurais osé coller des Post-it sur ceux de la Manif pour tous sans mes ami·e·s, j’aurais eu peur de me faire agresser. En groupe, on est plus fort·e·s.

Un jour, il nous est arrivé de nous faire arrêter, parce que nous étions présent·e·s lors d’une manifestation de la Manif pour tous, afin d’écouter leurs arguments. Le fait d’être ensemble à ce moment-là nous a aidé·e·s à ne pas nous sentir seul·e·s face à ce qui était une oppression. Lorsqu’on se fait insulter et que nous sommes tou·te·s les cinq, nous le prenons avec beaucoup d’humour.

Le safe space nous permet de ne plus nous sentir différent·e·s

C’est ça être un·e allié·e, c’est aider ses ami·e·s, sa famille ou n’importe qui à se sentir bien dans sa peau et à s’accepter tel·le qu’iel est. Parfois, on peut aider en faisant des choses concrètes : les accompagner quelque part (même les raccompagner chez eux), les soutenir durant leur transition ou même, simplement dire : “Je suis là pour toi, je te comprends et je t’accepte tel·le que tu es.”

Car, parfois, on a juste besoin d’être compris·e·s, soutenu·e·s ou écouté·e·s. Là est le rôle du safe space. Il nous permet de nous échapper du jugement continu, de ne plus nous sentir différent·e·s, d’être entouré·e·s de gens bienveillants ou possédant juste une ouverture d’esprit qui réchauffe.

Manon, 16 ans, lycéenne, Île-de-France

Ce témoignage provient des ateliers d’écriture menés par la ZEP (la Zone d’Expression Prioritaire), un média d’accompagnement à l’expression des jeunes de 15 à 25 ans, qui témoignent de leur quotidien comme de toute l’actualité qui les concerne.