La loi “anticasseurs” adoptée par les députés en première lecture

La loi “anticasseurs” adoptée par les députés en première lecture

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© CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

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Par Astrid Van Laer

Publié le

Cinquante députés LREM se sont abstenus, aucun n’a voté contre.

Cinquante députés LREM se sont abstenus, aucun n’a voté contre.

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L’Assemblée nationale a adopté en première lecture ce mardi la proposition de loi controversée des Républicains “visant à prévenir les violences lors des manifestations”, surnommée “anticasseurs” avec 387 voix contre 92, et 74 abstentions.

La grande majorité des députés LREM et MoDem, ainsi que des LR et UDI ont voté pour, l’ensemble de la gauche s’est prononcé contre. Aucun député de la majorité n’a voté contre. En revanche, 50 d’entre eux se sont abstenus. “L’essentiel, c’est qu’il n’y a eu aucun vote contre” a commenté dans la foulée du vote, Gilles Le Gendre, le président du groupe à l’Assemblée.

Le texte sera examiné au Sénat en deuxième lecture le 12 mars, le gouvernement souhaitant une adoption définitive rapide dans le contexte des manifestations récurrentes des gilets jaunes. D’ici là, voici les dispositions principales contenues dans ce texte :

  • Les fouilles

Sur réquisition du procureur, des fouilles des sacs et véhicules seront possibles dans les manifestations et à leurs abords, afin de rechercher des “armes par destination” comme les marteaux, ou boules de pétanque.

Le gouvernement prévoit d’améliorer la rédaction de cet article 1 dans la navette parlementaire.

La proposition de loi sénatoriale prévoyait initialement que le préfet puisse autoriser des palpations de sécurité et des fouilles de sacs “pendant les six heures qui précèdent” une manifestation et jusqu’à dispersion, “dans un périmètre délimité”.

La mesure avait hérissé certains dans la majorité, inquiets d’atteintes à la liberté d’aller et venir notamment, et qui avaient aussi mis en doute son caractère opérationnel, les rassemblements étant souvent mobiles. 

  • Les interdictions administratives

Les préfets pourront prononcer des interdictions de manifester à l’encontre d’individus représentant “une menace d’une particulière gravité pour l’ordre public”, sous peine de six mois d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende en cas d’infraction. 

Des “critères objectifs” ont été ajoutés, via un amendement gouvernemental : la personne devra avoir commis des “atteintes graves à l’intégrité physique des personnes ainsi que des dommages importants aux biens” ou encore “un acte violent” lors de manifestations précédentes.

Le préfet sera en droit d’imposer une convocation à la personne concernée, afin qu’elle ne se rende pas à la manifestation. En cas de participation potentielle à d’autres rassemblements, le préfet pourra interdire à la personne de prendre part à toute manifestation sur le territoire national durant un mois maximum.

Les personnes “interdites” de manifester pourront faire un recours en urgence devant la justice administrative, a fait préciser la rapporteure LREM Alice Thourot. 

Certains élus LREM restent vent debout contre cet article 2, qui restreint selon eux abusivement “la liberté fondamentale de manifester”. Les députés MoDem ont échoué, à deux voix près, à imposer que la personne ait été condamnée au préalable pour se voir interdite de manifestation. 

Fichier

La proposition de loi initiale prévoyait la création d’un fichier national des interdits de manifester, comme il en existe un pour les hooligans interdits de stade depuis 2007. Les députés ont revu le dispositif : pas de fichier dédié, mais une inscription au fichier des personnes recherchées (FPR).

Dissimulation du visage

Un délit de dissimulation volontaire totale ou partielle du visage dans une manifestation sera créé, assorti d’une peine d’un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende. Ce sera à la personne d’apporter un “motif légitime” à la dissimulation de son visage pour ne pas être condamnée, en vertu d’un amendement MoDem.

“Casseur-payeur”

Enfin, alors que les sénateurs avaient voté une présomption de responsabilité civile collective en cas de condamnation au pénal pour des violences contre les personnes ou des atteintes aux biens, les députés ont encadré la mesure. L’État pourra exercer son recours sur le plan civil contre toute personne à l’encontre de laquelle sera rapportée la preuve qu’elle a participé aux faits dommageables, mais sans la nécessité d’une condamnation pénale.

Konbini avec AFP