Européennes : Marine Le Pen lance un “emprunt patriotique” avec intérêts

Européennes : Marine Le Pen lance un “emprunt patriotique” avec intérêts

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(c) Twitter, Rassemblement national

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Par Clothilde Bru

Publié le

Les prêts, possibles à partir de 1 000 euros, seront remboursés avec un intérêt de 5 %.

Le parti de Marine Le Pen est à la peine. À moins de deux mois des élections européennes, il n’a pas les fonds pour financer sa campagne, et aucune banque ne semble encline à lui prêter. “Aucune banque n’accepte, comme par hasard, de nous prêter la somme nécessaire pour mener notre campagne”, dénonce la présidente du Rassemblement national (RN) dans une vidéo mise en ligne sur Twitter.

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Si les banques ne veulent pas prêter, le RN voit dans chacun de ses électeurs un prêteur potentiel : “Vous pouvez nous apporter une aide décisive en vous joignant à l’emprunt patriotique que nous lançons, en prêtant la somme de votre choix à partir de 1 000 euros au RN. Vous obtiendrez 5 % d’intérêts”, a précisé la députée dans ces images, également diffusées sur une plateforme dédiée.

Il est donc désormais possible de prêter directement de l’argent au RN, via empruntpatriotique.fr.

Ce n’est pas la première fois que le parti d’extrême droite doit en appeler à ses adhérents pour régler ses problèmes de trésorerie. En 2017, Marine Le Pen s’était déjà appuyée sur les dons de ses électeurs pour financer la campagne des élections présidentielles puis des législatives.

La démarche est décisive. Jusqu’alors, le RN pouvait compter sur le soutien de Cotelec – le micro-parti du père de Marine Le Pen – pour contourner la réticence des banques. Seulement, cette fois-ci, Cotelec ne viendra pas en aide au Rassemblement national. A priori, cela n’a rien à voir avec la bisbille entre le père et la fille, qui sont d’ailleurs réconciliés.

En effet, Jean-Marie Le Pen a indiqué début février sur son blog que Cotelec ne souhaitait pas prêter d’argent au RN suite à un défaut de remboursement : “Malheureusement, nous avons un débiteur qui, pour l’instant, n’est pas en mesure de nous payer, par conséquent, nous ne pouvons pas prêter.”

À quoi va servir cet argent ?

Ces prêts sont censés permettre au Rassemblement national de financer sa campagne aux élections européennes : location de salles, déplacements des candidats, impressions de bulletins…

Si, à première vue, la recherche de financement semble un peu tardive – les élections ont lieu le 26 mai prochain –, il n’y a pas lieu de s’inquiéter pour la formation politique d’extrême droite. D’une part, elle est créditée à 22 % en tête, au coude à coude avec celle du président de la République.

D’autre part, Jean-Luc Mélenchon, qui a eu recours au même stratagème mais sous un autre nom, “emprunt populaire”, a récolté 1,5 million d’euros en une semaine. Il est possible de prêter à La France insoumise dès 400 euros, mais il n’y a aucun argent à se faire. Il s’agit de prêts sans intérêts.

Selon Le Monde, le RN a besoin de 4 millions d’euros. En revanche, un autre paramètre pourrait bien freiner la collecte organisée par Marine Le Pen : comme le souligne le quotidien national, “les noms des prêteurs (contrairement aux donateurs) sont désormais obligatoirement publiés au Journal officiel”, ce qui n’était pas le cas en 2017.

Pourquoi est-il si difficile d’emprunter aux banques ?

Dans la vidéo enregistrée par Marine Le Pen, cette dernière semble dénoncer à demi-mot une théorie du complot dont on reconnaît les atours, à l’instar du fameux “comme par hasard”, élément de langage classique de cette rhétorique :

“Comme pour d’autres listes d’opposition, qui sont dans le même cas, aucune banque n’accepte, comme par hasard, de nous prêter la somme nécessaire pour mener notre campagne […]. Ces refus sont […] injustifiables et relèvent, ni plus ni moins, que de la persécution contre les opposants.”

D’autres partis d’opposition sont en effet dans la même galère que celui de Marine Le Pen, à l’instar de La France insoumise, mais aussi Debout la France, porté par Nicolas Dupont-Aignan, qui devrait lui aussi recourir à un “emprunt populaire” pour sa campagne européenne.

En fait, selon Le Monde, les temps sont durs pour tous les partis confrontés “à la frilosité d’institutions dont les conditions de crédits sont devenues ‘impossibles’.”

Les partis qui s’en sortent sont donc ceux qui ont su thésauriser, à l’instar du Parti socialiste qui a profité de la vente de son siège de Solférino, ou du parti Les Républicains qui, selon le quotidien, a entamé un long processus d’assainissement de ses comptes depuis cinq ans.

Quant à la formation de la majorité, il lui suffit de piocher dans l’enveloppe de dotation publique de 22,5 millions d’euros, qu’elle a reçue suite à sa victoire aux élections législatives.

Pour obtenir un remboursement de ses frais de campagne par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, un candidat aux élections européennes doit obtenir au moins 3 %, entre autres obligations.